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Derrière sa légendaire douceur de vivre, la Suisse romande n'est pas à l'abri des passions humaines. Sans doute parce qu'elle possède une âme, habitée, comme toute âme, par les noirceurs de la vie. Ainsi, du bassin lémanique au pays de Fribourg, des cantons de l'arc jurassien au Valais, le crime est passé, le sang a séché. Ses traces n'en ont pas pour autant déserté nos mémoires, et certains noms nous font encore frémir : Michée Chaudron, pendue et brûlée comme sorcière en place de Plainpalais, Claude Vary, dont l'exécution ratée scandalisa l'opinion publique, Maurice Elcy, dernier guillotiné du canton de Genève, l'empoisonneur Héli Freymond, ou encore Étienne Chatton, qui jouait de la hache. Personne n'a oublié non plus Luigi Luccheni et sa lime affûtée qu'il fit glisser sous le sein droit de la belle impératrice d'Autriche, ni plus tard le bâtonnier Pierre Jaccoud, révolvérisant à Plan-les-Ouates son rival en amour... un vieillard de 74 ans ! À ces histoires exceptionnelles mais connues, l'auteur en a ajouté d'autres dont l'ampleur fut telle au moment de leur déroulement, qu'elles furent projetées à la une des journaux et en pleine place publique. Passés dans le tamis des dérèglements passionnels, elles sont aussi des faits d'Histoire. Les voici enfin ressuscitées par la magie des mots, des mots éphémères qui racontent des maux éternels, pour un ouvrage riche en fureurs, débusquant dans les marges de la société suisse romande sa vérité profonde. Si bien que pour être entièrement fondé sur la mort, le livre de Jacques Rouzet n'en est pas moins une vibrante célébration de la vie humaine, dans sa violence, dans sa dignité aussi.